It’s getting dark, 2014

“Cette série photographique insolite résulte d’une demande faite par l’artiste à ses modèles, prendre la pose, en une gestuelle libre, tout en se couvrant la tête. « Invités le temps d’une séance de pose à mon atelier, je demande à des hommes et femmes de se voiler la face avec un vêtement ou une étoffe de leur choix », nous apprend Christophe Beauregard.

“It’s Getting Dark” (« Il fait nuit », « Il fait sombre », « Il va bientôt faire nuit »…) est une offre visuelle au sens improbable, où l’on ne saurait dire ce qui se trame : parce qu’ainsi l’a voulu le photographe. Se portraiturer mais cacher son visage est, de facto, absurde. Photographier quelqu’un en lui demandant de masquer son visage l’est tout autant. Alors quoi ? Voiler une chose, la soustraire au regard, c’est la rendre intrigante, désirable. Mais voiler la chose, c’est aussi signifier que le regard n’a pas à s’en saisir. On connaît les usages sociaux, en matière corporelle, du voile radical (le niqab dans la culture musulmane), dont la fonction est d’éloigner le regard et d’éviter la fixation sur le visage. Mais on connaît aussi la stratégie qui consiste à cacher en partie à toutes fins de susciter la frustration et, partant, une attention redoublée (voir les mannequins défilant visage couvert d’un masque ou d’un foulard dans les défilés de mode du styliste Martin Margiela).

Curieux jeu pipé que celui-ci. Le photographe comme ses modèles s’y interdisent ce moment par excellence révélateur qu’est le dévoilement, contre la vocation même de la photographie (du grec φωτoς, photos, la « clarté »), étymologiquement l’écriture de ce que révèle la lumière.”

Paul Ardenne, écrivain et historien de l’art.
8 photographies couleur C-Print
C-Print 90 x 90 cm
C-Print 49,5 x 49,5 cm
Édition de 8 + 2 EA

It’s getting dark. Prix catalogue

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